Le collectif Le Revers se mobilise pour les municipales à Paris
« Les associations tirent la sonnette d’alarme », « l’heure est grave », « il y a urgence à agir ». La situation des personnes sans domicile se détériore à Paris, et les alertes qui émanent de la société civile ne semblent plus trouver d’écho suffisant auprès du monde politique pour entraîner de véritables changements structurels.
Lors de la dernière Nuit de la solidarité à Paris, le nombre de personnes sans-abri décomptées a de nouveau augmenté, avec une proportion de femmes toujours plus importante. Malgré l’engagement constant de nos associations et la mobilisation quotidienne de nos salarié.es et bénévoles, la situation ne cesse de se dégrader pour les personnes sans domicile. Face à cette réalité, nous constatons chaque jour notre impuissance croissante. En 10 ans, le nombre des personnes sans domicile a doublé en France et celui des personnes qui meurent de la rue augmente inexorablement chaque année. Le 115 doit souvent laisser dehors des personnes de plus en plus jeunes et vulnérables et les campements informels semblent être la seule solution privilégiée par les autorités pour accueillir les populations primo-arrivantes.
Lors des grands événements qui traversent notre société, ces dernières sont souvent cachées, déplacées, invisibilisées et victimes de nettoyage social, à l’instar des Jeux Olympiques de Paris 2024, durant lesquels 20 000 d’entre elles ont été expulsées de leur habitat précaire en 1 an et demi dans la région Île-de-France.
Ces personnes sont souvent instrumentalisées pour attiser la peur et nourrir des discours discriminants.
La récente pétition mensongère prétendant que 36 « salles de shoots » allaient ouvrir à Paris en est la parfaite illustration : agiter l’épouvantail de projets inexistants pour attiser les inquiétudes des parisien.ne.s à l’approche des municipales, tout en jetant le discrédit sur l’accompagnement médico-social auprès des personnes usagères de drogues.

Si les pouvoirs publics se préoccupent périodiquement de faire disparaître le phénomène du sans-abrisme en fonction des évènements sportifs ou de la météo, les propositions politiques pour combattre la précarité sont trop rares.
Pourtant des solutions existent.
Les associations, syndicats de professionnels, collectifs communautaires et ONG ne cessent d’émettre des recommandations. A Paris, l’installation d’un lieu inconditionnel de premier accueil des personnes exilées comme cela a été fait à destination des personnes ukrainiennes (ici et ici) serait une réponse immédiate à la présence permanente de campements depuis 10 ans dans la capitale.
Mais une autre réponse, essentielle, ne demande aucun dispositif exceptionnel : il s’agit simplement que les pouvoirs publics respectent les obligations légales qui leur incombent. Cela signifie garantir un hébergement digne aux mineurs en recours, aux femmes enceintes, aux mères isolées et à leurs nourrissons. Iels ne devraient être contraint.es de dormir dehors, réalité pourtant devenue courante à Paris, alors même que l’hébergement de ces publics relève du conseil départemental, qui, constitue dans la capitale, forme une seule et même collectivité avec la Ville.
Il est temps de sortir de l’urgence et du rapport de force.
Combien faudra-t-il d’occupations de places publiques, de bâtiments et de parvis de mairies pour que les autorités travaillent de concert et mettent enfin des moyens adaptés sur la table pour que des réponses à long terme soient trouvées ? Combien de destins individuels devront se briser sur les trottoirs de nos villes avant que les autorités publiques se mettent au diapason des personnes concernées et des acteurices de terrain ?
Les deux prochaines années seront marquées par des temps électoraux forts, alors que la situation sociale est alarmante. En 2023, 15,4 % de la population française vivait sous le seuil de pauvreté, soit près de 9,8 millions de personnes. Dans le même temps, selon une étude de l’Observatoire des libertés associatives, les associations citoyennes sont 41 % à s’être déjà auto censurées pour éviter des conflits avec les pouvoirs publics. Le Conseil économique social et environnemental parle lui « d’urgence démocratique » quant à la nécessité de financer les actions de solidarité envers les plus précaires. C’est donc dans un contexte d’austérité budgétaire et de politiques défavorables à nos combats collectifs que s’inscrivent les prochaines élections municipales.
C’est pour ces raisons que, fortes de leur expérience au sein du collectif du Revers de la Médaille et dans la perspective de ces élections, plusieurs associations ont décidé de relancer une dynamique collective ayant pour ambition de faire de la question du sans-abrisme, de l’exclusion sociale et de la solidarité envers toutes les populations à la marge un thème fort de la campagne parisienne. Sans prendre parti pour un.e candidat.e, ni pour un parti, nous, collectif “Le Revers”, souhaitons que les candidat.es s’engagent concrètement sur un plan de prise en charge des personnes sans domicile.
Notre collectif souhaite mettre en lumière la situation des personnes qui sont dans l’espace public et leur donner la parole. Certes, nombre de personnes à la rue n’ont pas le droit de vote ou ne votent pas, mais leur sort et leur avenir sont l’affaire de tou.tes. Iels sont eux aussi des habitant.es de la ville, nos voisin.es et leur devenir semble être un angle mort de toutes les crises ou évènements collectifs que nos sociétés traversent.
Nous appelons l’ensemble des candidat.es à se saisir du problème et à travailler avec nous à l’élaboration de ce plan de prise en charge des personnes sans domicile. Nous n’aurons de cesse d’être force de proposition et de faire irruption dans l’espace public et médiatique pour faire entendre les voix de nos organisations de terrain et des personnes que nous accompagnons.
Le collectif Le Revers.